En Normandie, le business des biomasses « vertes » en pleine croissance

Environ 80 entreprises de la région ont participé aux états généraux de la bioéconomie à Cherbourg (Manche), mercredi 11 et jeudi 12 mai 2022. La filière normande, en pleine croissance, vise à valoriser les énergies issues de biomasses (végétaux, plantes aquatiques), mais aussi à attirer de gros investisseurs.
L’écorce du blé peut devenir biocarburant. Le moût du raisin se transforme en produit cosmétique. Le chanvre est utilisé comme matériau de construction. Ces biomasses ont la cote. Elles attirent les investisseurs de la bioéconomie. Le principe : produire de l’énergie à partir de ces matières organiques, d’origine végétale, animale, bactérienne ou fongique.

Mercredi 11 et jeudi 12 mai 2022, 150 personnes représentaient environ 80 entreprises – dont certains mastodontes normands comme Natup ou Dielen – pour les états généraux de la filière, à Cherbourg (Manche). Derrière l’initiative, un récent partenariat entre la Région et le réseau Bioeconomy for Change (dit « B4C », 500 groupes adhérents dont Nestlé, Total, LVMH, Yves Rocher) autour des filières de la biomasse.

Trouver des débouchés économiques
Parmi les présents, l’organisme nantais Via Végétale, qui produit notamment des principes actifs pour la coopérative normande Agrial (12 000 agriculteurs adhérents). « Typiquement, les algues ont un intérêt en agriculture, décrit son responsable recherche et développement, Victor Maignan. Mais la contrainte, en Normandie, est de trouver des débouchés économiquement rentables pour tout le monde. À appliquer seules sur des parcelles, elles sont très mal vendues. Si on les valorise en concentrant certains actifs, par exemple pour résister au stress hydrique, on apporte une valeur ajoutée. »

Les algues entrent aussi dans la composition des cosmétiques du laboratoire Gilbert, implanté à Hérouville-Saint-Clair (Calvados), près de Caen, depuis 1904, 230 millions d’euros de chiffre d’affaires. L’eau de mer est utilisée dans ses sprays contre le rhume. « Pour nous, les enjeux sont de savoir comment assurer la robustesse de nos formules, et leur reproductibilité », expose Sylvie Chopin, directrice innovation et développement.

B4C, qui fait du lobbying à Bruxelles, vante les propriétés de ces matières pour la santé et l’écologie. Sans oublier l’intérêt commercial de ces nouveaux produits. La consommation de protéines végétales a d’ailleurs bondi de 50 % en deux ans en France. « Il y a un business, un fort vecteur de croissance », présente la chargée de communication. « Cela répond aussi à un enjeu de souveraineté, on le voit avec les crises du Covid et de la guerre en Ukraine, qui fait exploser les prix des céréales », pose Boris Dumange, directeur général.

De plus petits acteurs ont aussi fait le déplacement au milieu des géants. La ferme aquaponique de Cherbourg-en-Cotentin (la seule du département de la Manche) valorise les biomasses de truites arc-en-ciel afin de produire des légumes vendus en circuit court. « Je ne m’y retrouve pas vraiment…, lance son gérant, Laurent Queffelec, dubitatif. On est très économe, on ne produit que 2 à 3 kg de déchets par semaine. En revanche, des entreprises plus importantes ou très spécialisées peuvent trouver un intérêt à ces rencontres afin de baisser leurs coûts environnementaux. Mais ne soyons pas dupes, l’un des objectifs de ce partenariat est de générer de la croissance, de l’export. »